Le premier volet du Projet Chez soi (2009 à 2013)

Le projet Chez Soi est une étude pancanadienne sur l’itinérance et la maladie mentale. Ce projet a été déployé simultanément dans cinq villes canadiennes, dont Vancouver, Winnipeg, Toronto, Montréal et Moncton, entre 2009 à 2013. La Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) a octroyé 110 millions de dollars pour permettre la réalisation de ce projet.

Le projet Chez soi vise à donner l’accès au logement aux personnes itinérantes atteintes d’un trouble de santé mentale, par l’intermédiaire de l’approche Logement d’abord (Housing First). Ce modèle d’intégration est né à New York en 1992, dans le cadre du projet sous l’égide de l’organisme Pathways to Housing

Le Logement d’abord – Mettre rapidement un terme à l’itinérance

Le Logement d’abord propose l’accès immédiat à un appartement aux personnes itinérantes atteintes d’un trouble de santé mental, en même temps que des services de soutien dans la communauté. Un supplément au loyer fait en sorte que le participant peut vivre dans un appartement décent pour 25% ou 30% de ses revenus (selon si le chauffage est inclus dans le loyer). L’intensité du soutien dans la communauté est modulé en fonction du niveau de besoins du participant : le suivi intensif dans le milieu (SIM), pour les participants dont les besoins sont élevés et le soutien d’intensité variable (SIV) pour ceux dont les besoins sont modérés. Les participants devaient accepter la visite d’un membre de l’équipe clinique au moins une fois par semaine comme seule condition pour recevoir le supplément au loyer.

L’objectif de ce projet consistait à évaluer l’efficacité et la rentabilité d’une telle approche. Sa réussite se traduit principalement par la stabilité résidentielle, mais aussi en termes de qualité de vie, de fonctionnement personnel et social, ainsi que par d’autres mesures reliées au bien-être. Le recrutement des participants et les suivis de recherche ont débuté en octobre 2009, le recrutement s’est achevé en mai 2011, tandis que les suivis de recherche se sont terminés en avril 2013.

Selon les études menées sur cette approche aux États-Unis, ce modèle d’intervention accroît considérablement la stabilité résidentielle. Mieux, les coûts associés au projet sont largement ou complètement compensés par une réduction des dépenses liées aux soins de santé d’urgence, à l’hébergement en refuges, et aux services judiciaires et correctionnels.

Le projet Chez Soi à Montréal

À Montréal, 469 participants ont été recrutés entre octobre 2009 et mai 2011. Ils ont d’abord été regroupés en fonction de leur niveau de besoins, modérés (MN) ou élevés (HN). Les participants HN ont été ensuite assignés au hasard à un groupe recevant les services Logement d’abord et SIM (groupe expérimental, n=81), ou à un groupe recevant les services habituels déjà disponibles à Montréal (groupe témoin, n=82). Les deux tiers des participants MN ont pour leur part été assignés aléatoirement à l’une ou l’autre des deux équipes SIV (groupe expérimental, n=204) avec accès aux services Logement d’abord, tandis que l’autre tiers gardait les services habituels (groupe témoin, n=102).

Les participants assignés au groupe des services habituels formaient le groupe témoin, et à ce titre ne recevaient pas les services Logement d’abord ou de supplément au loyer offerts dans le cadre du projet Chez Soi ; ils continuaient plutôt à utiliser les services déjà disponibles dans la communauté. Une équipe d’intervieweurs a rencontré les participants tous les trois mois pendant les deux ans suivant leur entrée dans l’étude. Le site de Montréal a atteint des taux de suivi exceptionnels, 91% des participants terminant les entrevues finales.

Portrait socio-démographique des participants au moment du recrutement

  • 44,1 ans : âge moyen des participants ;
  • 32,3% des participants sont des femmes ;
  • 78,4% ont travaillé au moins une année consécutive au cours de leur vie ;
  • 29 mois : plus longue période moyenne d'itinérance continue ;
  • 52 mois : période totale moyenne en situation d'itinérance ;
  • 35 ans : âge moyen lors du premier épisode d’itinérance ;
  • 21% ont au moins un enfant ;
  • 40% ont été hospitalisés plus de 2 fois pour des problèmes de santé mentale au cours d'une année dans les derniers 5 ans ;
  • 29% ont eu des démêlés avec le système judiciaire dans les derniers 6 mois ;
  • 33% présentent un risque suicidaire élevé ou modéré.

Loger les participants

Les participants assignés aux groupes expérimentaux (Logement d’abord) recevaient rapidement de l’aide pour accéder à un logement de leur choix (en termes de quartier, type d’immeuble, etc.), grâce à une subvention qui leur permettait de ne débourser que 25 à 30% de leurs revenus pour couvrir le coût du loyer. À Montréal, la subvention s’établissait en moyenne à hauteur de 375$ par mois. Certains participants ont pu conserver leur logement après le 31 mars 2013 grâce à des subventions de la CSMC et de la Société d'habitation du Québec (SHQ).

Les équipes

Plusieurs institutions et organismes communautaires montréalais ont collaboré à l’implantation du projet Chez Soi : le CSSS Jeanne-Mance a mis sur pied et géré une équipe SIM de même qu’une des deux équipes SIV; le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) a offert les services de ses psychiatres et, plus tard dans le processus, d’un coordonnateur pour l’équipe SIM; l’organisme communautaire Diogène a fourni la seconde équipe SIV.

L’Institut Douglas a pour sa part mis sur pied et géré l’équipe « logement » de même que l’équipe d’intervieweurs. La Mission Bon Accueil, un organisme communautaire qui comprend un refuge de nuit pour hommes et qui offre également une panoplie d’autres services, a offert aux participants qui le désiraient une fiducie destinée au paiement des loyers, prélevant directement le montant nécessaire dans le compte des participants.

Coordonnées

Pour toute question relative au projet Chez Soi, vous pouvez contacter:
Éric Latimer, Ph. D.
Chercheur principal du projet à Montréal
eric_dot_latimer_At_mcgill_dot_ca