Ampleur du phénomène


Il est difficile de préciser avec exactitude le nombre d’itinérants à Montréal. Lors de son dernier décompte en 1998, l’Institut de la Statistique du Québec comptait 28 214 personnes ayant fréquenté, à un moment ou à un autre, un centre d’hébergement, une soupe populaire ou un centre de jour. De ce nombre, 45% avaient été sans domicile fixe au cours de l’année précédente.

Pour l’année 2005, le Ministère de la Santé et des Services sociaux estime à 30 000 le nombre de personnes qui ont été en situation d’itinérance à Montréal durant au moins une partie de l’année.

Portrait de l’itinérance

Au cours des dernières années, le portrait de l’itinérance a grandement évolué. On retrouve de plus en plus de jeunes, de femmes, de personnes âgées et d’autochtones dans la rue. Cette population présente aussi d’importants problèmes de santé.

Santé mentale

On estime qu’entre 30 % et 50 % des itinérants aurait des problèmes de santé mentale, dont 10 % des troubles mentaux graves comme la schizophrénie, les troubles bipolaires et la dépression majeure.

  Au cours des 12 derniers mois À vie
Troubles mentaux
43,3% 17,7%
Troubles liés à l'alcool ou la drogue 45,6% 20,5%

Source: Bonin, J.-P., Fournier, L., Blais, R. et Perreault, M. (2005).

Toxicomanie

Plus de la moitié des adultes en situation d’itinérance et atteints de troubles mentaux auraient aussi des problèmes de dépendances.

Judiciarisation

Un nombre croissant d'itinérants est aussi judiciarisé. La multiplicité des problèmes chez cette population complique d’autant plus la mise en œuvre d’une intervention adéquate.

Itinérance, santé mentale et justice


Presque toutes les études portant sur les caractéristiques judiciaires des itinérants ayant un trouble mental ont été réalisées aux États-Unis. Ces études rapportent qu’entre 77% et 90% des itinérants atteints d'un trouble mental ont été arrêtés au moins une fois au cours de leur vie. D'autres études montrent aussi que 50% à 60% d'entre eux ont déjà été incarcérés.

Les hommes, les jeunes, ceux qui ont un trouble concomitant d’abus de substances et ceux qui sont itinérants depuis longtemps sont davantage en contact avec la justice criminelle.

Victimisation

Les itinérants ayant un trouble mental sont fréquemment victimes de crimes. Une étude rapporte par exemple que 45% d’entre eux ont été victimes d’un crime dans le dernier mois. Les femmes itinérantes ayant un trouble mental sont plus souvent victimes de crime que les hommes. Une autre étude estime qu'entre 74% et 97% d’entre elles ont subi de l’abus physique ou sexuel au cours de leur vie.

Il est primordial de comprendre comment ces caractéristiques s’appliquent à une population canadienne, mais aussi de mieux comprendre l’interface entre itinérance, santé mentale et justice. Ceci est particulièrement important dans le contexte de programmes de soutien au logement, comme le projet Chez Soi.



Laurence Roy/Anne Crocker